Cela
fait
maintenant plusieurs années que je réfléchis à l'idée d'écrire un livre
pornographique ou érotique, après m'être tardivement rendu compte que
mes scénarios traitaient généralement tous de thématiques morbides et
presque jamais de
plaisirs charnels (à l'exception de rares passages du "Marquis d'Anaon"
avec Matthieu Bonhomme, ou encore des "Derniers Jours d'un Immortel",
dessiné par Gwen de Bonneval mais qui reste une œuvre récente et timide
en ce domaine).
Bref, beaucoup de Thanatos pour peu d'Eros, alors que ces éléments fondamentaux
font part égale dans l'Histoire de l'Humanité… et donc dans la plupart des
histoires tout court.
Comment expliquer cet évitement plus ou moins conscient ?
Sans doute par de la pudeur mal placée, ou par une réelle appréhension du
regard des autres (d'autant que je suis plus connu pour mes livres
"jeunesse"), mais surtout par la peur de ne rien avoir de très
original à écrire sur la question.
Et puis j'ai eu une idée simple, pas vraiment neuve mais qui m'a soudain
décomplexé.
Au lieu de mettre en avant mes fantasmes ou mes "petits récits
pornographiques personnels", j'allais demander à des gens de me raconter
leurs histoires à eux : des histoires authentiques (ou présentées comme telles)
qui puissent me "parler" d'une manière ou d'une autre, en apportant
un petit quelque chose de différent, d'étonnant, de singulier.
Une bonne idée sur le papier, mais il restait tout de même à trouver des
interlocuteurs et interlocutrices qui accepteraient de me parler en toute
franchise de leurs histoires de cul.
J'ai alors pensé qu'internet me permettrait
en partie de remédier à ce problème, et j'ai donc entamé ce projet début 2010
en passant une annonce sur différents sites, mais en utilisant un pseudo et en communiquant une adresse mail anonyme :
sans doute un reliquat de ma peur de trop me dévoiler.
J'ai bien reçu une
dizaine de réponses en cours d'année, mais j'ai vite compris que mon anonymat
créait une forme de méfiance chez certains de mes contacts, tandis qu'au même
moment, en parlant ça et là de mon projet, je m'apercevais qu'il était
finalement beaucoup plus simple et naturel de parler de sexe en toute franchise
avec des ami(e)s proches, ou même des connaissances plus lointaines pour peu
qu'une relation de confiance se soit spontanément créée en cours de
conversation.
C'est à partir de ce moment que j'ai décidé d'écrire ce projet
sous mon vrai nom, en me disant qu'après tout, Tomi Ungerer ou Zep avaient bien fait des
livres "jeunesse" et des livres de cul, eux aussi.
J'ai donc commencé à recueillir des anecdotes, des bribes de récit, des phrases amusantes, des expressions…
Et je sais désormais
que ce processus demande beaucoup de temps. Car autant il m'est difficile de
définir avec précision le type d'anecdotes que je recherche (il peut s'agir
d'histoires banale ou décalées, étranges ou touchantes, poétiques ou
incongrues, drôles ou tragiques), autant je suis extrêmement pinailleur sur les
récits que je conserve ou non. Tout se passe comme si mon inconscient se
faisait une image très précise de ce qu'il attendait, mais que mon conscient
était bien en peine d'expliquer à mes interlocuteurs de quoi il s'agit…
Il n'empêche que bon an mal an, j'ai tout de même réussi à glaner quelques belles
histoires, un peu comme on le ferait en collectant patiemment des fleurs
destinées à un herbier (d'où le nom du projet).
J'en ai même suffisamment recueillies pour pouvoir alimenter
régulièrement une rubrique dans la revue numérique "Professeur Cyclope",
et pour envisager de publier un premier livre d'ici an environ.
Que désormais ceux et celles d'entre vous qui veulent me raconter de vraies
belles histoires de cul n'hésitent plus à me contacter !
Fabien Vehlmann